Ep.31 : Jean-Gabriel LEVON de Ynsect – Leader mondial de la production de farine d’insectes

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Notre podcast Business Positif a accueilli Jean-Gabriel LEVON, chief impact offcer de Ynsect, une entreprise française spécialisée dans l’élevage d’insectes et leur transformation en ingrédients à destination des animaux domestiques et d’élevage et aujourd’hui, des humains.

[RESUME DE L’EPISODE] Dans cet épisode nous parlons de :

La première fois qu’il mange des insectes ce sont des criquets, en 2010-2011, lorsque l’idée de lancer l’entreprise émerge dans la tête des 4 fondateurs d’Ynsect.

Les 4 étaient dans de grosses entreprises, dans le pétrole, l’énergie et avaient le sentiment d’être dans un navire ingouvernable. Ils étaient à la recherche de sens.

Il y avait aussi l’envie pour Jean-Gabriel LEVON d’entreprendre.

Depuis le début de l’aventure, Ynsect vend ses produits dans le domaine du Petfood (nourritures pour animaux). Depuis 2017, elle s’est étendue à l’aquaculture et elle vient d’obtenir l’agrément pour la nourriture humaine depuis le début d’année.

Des idées dans l’air du temps qui font de grandes idées d’entreprise et un business model atypique

Selon Jean-Gabriel LEVON, il y a des idées qui sont dans l’air et que l’on attrape.

C’est le cas pour les insectes depuis quelques années. Il y a le savoir-faire et l’informatisation. Quand on joint ces deux-là, une industrie peut naître et c’est maintenant.

Chez Ynsect, on a agit un peu comme un paratonnerre à ce niveau là

C’est Alexis Angot qui amène aux 3 autres fondateurs le rapport de la FAO dans lequel ils découvrent que nous serons 10 milliard d’être humain en 2050. Une question est alors posée : que va-t-on manger ?

Une des pistes évoquées serait de continuer à manger des insectes là où il est coutume d’en manger.

Dans certains pays, les enfants passent à côté de protéines essentielles et sont en malnutrition alors qu’il était autrefois coutume de manger des insectes.

En France, par exemple, nous avons mangé des insectes pendant très longtemps.

Cependant, pour pouvoir manger des insectes quotidiennement, il faut les volumes nécessaires. Pour cela, il faut des élevages.

Le business model de Ynsect n’est pas courant, car ils conçoivent eux-mêmes leurs usines.

Ce n’est pas forcément le bon choix au départ, car c’est extrêmement coûteux, mais aucune entreprise ne pouvait produire ce qu’Ynsect souhaitait. Les startups font, en général, appellent à des usines déjà existantes. 

L’entreprise a donc été fondée en 2011 et le projet de construction de la première usine est né en 2014. Elle a ouvert en 2016. Cela représente de gros investissements, au moins sur la première dizaine d’années.

Pour trouver les premiers clients, les fondateurs se sont répartis les rôles. Selon Jean-Gabriel LEVON, les aventures d’industriels sont vraiment des aventures d’équipe.

“Il faut du monde dans une aventure comme celle-ci. c'est industriel au sens noble du mot.”

Aujourd’hui, ils ont une équipe commerciale qui se charge de trouver les clients.

Il faut avoir des clients avant de lancer la construction d’une usine, car sans client, il est impossible de monter le financement.

Par exemple, avant de lancer la construction de l’usine à Amiens, Ynsect avait déjà plus de 100 millions d’euros de contrats signés.

Comment travailler avec la concurrence et définir ensemble une base commune

Ceux qui travaillent dans l’agroalimentaire ont la même raison d’être : nourrir le monde. 

Ce sont des collègues pour moi.

Jean-Gabriel LEVON  regrette que notre monde soit autant accès sur la concurrence en oubliant l’entraide nécessaire pour avancer et avoir un réel impact durable, économique et éthique.

Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas qu’il y ait de concurrence mais seulement qu’il ne faut pas qu’il y en ait tout le temps.

Toutes les entreprises dans le secteur de la nourriture à base d’insectes ont mis en commun leurs expériences et expertises pour co-construire les règles du jeu européennes, écrire des livres blancs.

Ce n'est pas un sujet concurrentiel, c'est un sujet d'industrie.

Jean-Gabriel souligne que le secteur travaille bien en équipe et qu’une industrie est forcément composée de plusieurs industriels ! Ils étaient au début 10 et sont aujourd’hui 90.

Plus on est nombreux, plus on va pouvoir avoir une voix.

B-Corp : une certification en adéquation avec les valeurs de l’entreprise

Ynsect a toujours fait attention à la raison d’être. Régulièrement, ils reviennent sur leur valeurs pour s’assurer que ce sont toujours les mêmes.

Jean-Gabriel LEVON nous parle du livre “Reinventing organizations : Vers des communautés de travail inspirées” de Frédéric Laloux. Ce livre parle de l’évolution des modèles organisationnels et de comment réfléchir des organisations qui sont au service de l’humain plutôt que des organisations qui se servent de l’humain.

Jean-Gabriel LEVON trouve le message de B-corp intéressant : “be the best for the world” au lieu de “be the best of the world” (soit “le meilleur pour le monde”, au lieu de “soit le meilleur du monde” ndlr).

Être les meilleurs pour le monde n’empeche pas d’être les meilleurs du monde, mais l’impact négatif sur le monde est moins important.

Ynsect a passé la certification B-corp en octobre 2020. Dans cette démarche, il faut avoir un impact significatif et positif sur le monde grâce au business. Ynsect l’a donc intégrée dans ses statuts. 

Une entreprise citoyenne qui engage ses collaborateurs

Pour Jean-Gabriel LEVON, construire une bonne équipe c’est fondamental. C’est enthousiasmant mais très complexe : Un mauvais recrutement ou une collaboration qui échoue… C’est toujours lié à des problématiques d’égos, de savoir ménager mais réussir à challenger…

L’entreprise recrute beaucoup en ce moment.

Ynsect c'est une ado qui pousse vite et qui a des crises, quand ça pousse vite vous faites comme vous pouvez pour onboarder au mieux.

Il y a eu une mouvance comme quoi l’entreprise devait se cantonner à la rentabilité financière pour les actionnaires alors qu’elle peut aussi avoir un rôle citoyen.

C’est ce que tente de faire Ynsect.

Le SMIC a été augmenté de 35%. Aussi, Ynsect a mis en place un congé de parentalité, non pas de maternité ou de paternité. En effet, l’entreprise paie ce que ne paie pas l’État.

Sur la question de l’engagement, Jean-Gabriel LEVON ne pense pas qu’il soit possible de motiver quelqu’un.

La motivation c’est quelque chose qu'on a en soit ou pas. On peut l'avoir à un moment et ne plus l'avoir après.

Si les collaborateurs ne se sentent pas bien dans l’entreprise, elle va les aider à trouver leur voie.

Jean-Gabriel LEVON est persuadé que cette approche est logique car nous parlons de l’humain. D’ailleurs les collaborateurs sont les meilleurs ambassadeurs d’une marque, même lorsqu’ils quittent l’entreprise. 

Ynsect a créé une école pour les nouveaux collaborateurs.

Puisque Ynsect est une e-tech, il faut plusieurs mois pour être opérationnel dans l’entreprise, bien comprendre ce qu’il s’y passe.

De plus, certains métiers très spécifiques n’ont pas encore de formation dans le cursus ordinaire. Par exemple, éleveur d’insectes.

Un département dédié à l’impact et à sa mesure

En tant que chief impact officer, Jean-Gabriel LEVON s’occupe de mesurer concrètement l’impact. L’entreprise s’est rendue compte qu’il fallait une personne dédiée pour porter véritablement l’impact.

Si on veut être sérieux, il faut passer par la mesure. Pour mesurer, il nous faut des outils.

Il y a une quarantaine d’axes différents, selon la communauté scientifique. Chez Ynsect, nous en avons choisi 6 : 

  • Les euros, pour la performance du point de vue économique,
  • La tonne de CO2 équivalente pour le changement climatique,
  • Le DALY, pour la prise en compte de la santé humaine,
  • Le PDF/m2/an qui correspond au nombre d’espèce sur une surface donnée. Cela permet de mesurer la santé des écosystèmes,
  • Le mégajoule pour la ressource énergétique,
  • Le mètre cube pour la ressource en eau.

Ce département est un département transverse. Jean-Gabriel LEVON est donc tout seul mais il travaille en permanence avec une trentaine de personnes.

L'impact n'appartient pas à un département mais à tout le monde, on veut que ça reste un département projet et transverse

Il s’inspire beaucoup des outils de la finance qu’il applique à des unités qui ne sont pas des euros.

Par exemple, leur comptabilité carbone se base sur la méthodologie de l’empreinte carbone.

En donnant un coefficient d’émission à 1€, ils sont capables de dire sur une facture combien cela a coûté en CO2 équivalent.

Même s’il manque certains éléments comme l’impact des collaborateurs qui se rendent au bureau, il s’approche d’une mesure totale.

Il vaut mieux être globalement juste que exactement faux.

Une levée de fonds pour financer les usines

Ynsect a levé 372 millions de dollars. Ce sont des montants énormes qui sont en jeu pour financer une usine.

L’idée est d’arriver à quelques dizaines d’usines d’ici 2030. Chaque localisation aura son histoire et son contexte particulier. 

Dans la première phase, en période d’innovation, l’argent sert à explorer, faire des tests. Ensuite, il y a la phase de développement, au cours de laquelle les dépenses seront forcément rentabilisées. Pendant la deuxième phase, il ne s’agit plus d’innovation pure mais plutôt d’amélioration continue.

Participer aux tremplins et gagner des prix : une étape importante

Pour Jean-Gabriel LEVON, participer aux différents concours proposés permet :

  • d’apporter de la reconnaissance pour les équipes,
  • de rencontrer des gens,
  • de communiquer sur l’entreprise,…

Pour lui, c’est très important, surtout au démarrage, pour être mis en avant. Puis le prix de certains concours sont des financements, du matériel…

Cela aide aussi à structurer ses idées en répondant à des questions spécifiques lors des candidatures. C’est précieux.

Des investisseurs “star” qui communiquent sur le projet

Le sujet de l’entreprise interroge, c’est “à la mode”. La notoriété de la marque se fait donc assez naturellement, sans dépenser d’argent dans ce but là.

Selon Jean-Gabriel LEBON, le meilleur argument de vente d’Ynsect  c’est la qualité et la performance. 

L’impact, le côté humain et social, c’est une cerise sur le gâteau.

Puis, l’arrivée en tant qu’investisseur de Robert Downey Junior a impacté la notoriété d’Ynsect. Il s’est fait l’ambassadeur de la marque en en parlant.

Un conseil pour les auditeurs ?

Quand on est entrepreneur, la meilleure chose à faire c’est d’embaucher rapidement la personne qui sera meilleure que soi-même.

"On pense toujours que si on lâche sa pile de lego, il n’y aura plus rien à faire mais il y a toujours une autre pile de lego à côté."

Il faut aussi savoir prendre de vraies vacances et se reposer.

Une musique ou un film qui illustre la vision du business positif de Jean-Gabriel LEVON

Kung Fu Panda 2 et le inner peace (la paix intérieur)

Une recommandation d’un autre acteur du monde de l’entreprise pour ce podcast

Un grand merci à Jean-Gabriel LEVON et à Ynsect pour cette interview !